Jugan est un ancien militant d’extrême-gauche
des années 70. Il a tué pour sa cause et n’a jamais renoncé à la lutte armée. Défiguré,
il sort de prison après des années d’enfermement en haute sécurité. Clotilde
est une ancienne camarade de Jugan. Elle n’a jamais abandonné son ami pendant son incarcération, mais
porte la culpabilité de ne pas s’être engagée à ses côtés dans la violence. Et
puis, il y a la jeune et belle Assia. Sorte d’Antigone des banlieues, qui
aspire à plus de liberté face à ce père qui l’étouffe. Elle travaille bien au
lycée, elle aide les enfants en difficulté après les cours. Mais, elle va
croiser Jugan. Ce roman parle de l’engagement politique, de la violence. Du
sentiment de trahison des idées et des êtres. C'est aussi un livre sur l’identité.
Jugan sans visage, est-il toujours celui qu’il fut ? Assia, beurette en
manque d’affection, est-elle uniquement ce que les autres veulent qu’elle soit ?
Clotilde, pleine de culpabilité, a-t-elle trahi ses idéaux ? Ou est-elle
restée fidèle à ce qu’elle est au fond ? Jugan est le roman des choix. A partir des idéaux des années 70 en France,
la lutte prolétaire, la lutte armée, Jérôme Leroy interroge nos choix de vie. Une
cause mérite-t-elle de mourir ou de tuer ? P.85 : « S’ils lui
avaient ordonné de tuer un ministre, de poser une bombe dans une caserne ou d’enlever
l’enfant d’un patron, il l’aurait fait. Pour la Cause. Et il était étonné de
voir qu’il y avait toujours eu à travers le temps des hommes pour reprendre l’étendard
de cette Cause, pour tout y sacrifier et s’y brûler dans un mélange de rage
inapaisable et de bonheur fou. Jugan était de cette race-là, une race
magnifique et dangereuse ». La violence de Jugan n’est pas seulement liée
à la cause. Il est la violence. Il est possédé par elle. Sinon pourquoi
asservir ainsi Assia ? La violence se nourrit des hommes. Assia elle-même
accepte cette violence et s’offre à elle. P.122 : « La nuit dernière,
l’homme à la face violacée l’avait prise de toutes le manières imaginables,
cherchant à l’humilier et à lui faire mal mais le pire c’est qu’elle avait aimé
cette souffrance, qu’elle en hurlait de plaisir ». Seule Clotilde, la
petite boiteuse, a su combattre la bête, en elle. Mais elle n’a pas
renoncé à son admiration.
Jérôme Leroy a une écriture
fluide et efficace. Pas un mot en trop. Une écriture au cordeau pour une
histoire de chair, de sang et de douleur.
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