Couverture : Vincent Van Gogh |
Marguerite aime Vincent. Vincent
aime peindre. Nous pourrions résumer ainsi le livre de Jean-Michel Guenassia.
Mais ce serait ignorer la puissance romanesque des personnages, la finesse de l’écriture
et ces couleurs aveuglantes qui illuminent les pages. Jean-Michel Guenassia,
connu pour le Club des Incorrigibles Optimistes, (Prix Goncourt des Lycéens)
imagine les derniers jours de Vincent Van Gogh. Et pour cela, il se glisse dans
la peau de Marguerite Gachet, la fille du médecin qui hébergea Van Gogh à
Auvers-sur-Oise. La thèse officielle de la mort de Vincent Van Gogh par suicide
a été contestée dès le début du XXème siècle. Jean-Michel Guenassia imagine à
son tour une autre explication. Mais il nous propose surtout une réflexion sur
la création artistique. Cette fièvre, cette urgence qui pousse Vincent Van Gogh
à peindre sans répit (Van Gogh a peint 75 toiles durant son séjour à
Auvers-sur-Oise, qui ne dura que 70 jours). Marguerite essaie de peindre et ne
parvient qu’à imiter. Vincent a ses mots, définitifs (p.163) : « N’aie pas peur de te mettre en
danger, de te casser la figure et de souffrir. Trouve ton chemin seule, tu n’as
besoin de personne pour être peintre, regarde ce que tu as devant toi, ferme
les paupières, et peins ce que tu vois à l’intérieur de toi. Et si tu ne vois
rien, s’il n’y a rien, arrête de peindre ». Ce qui vaut pour la
peinture semble valoir pour toute création artistique, écriture comprise. Prendre
la réalité, et la tordre. La malaxer, la modeler pour en faire quelque chose de
grand, de beau et d’universel. L’artiste parvient à toucher les autres avec ce
qu’il a de plus intime. Violence inouïe. Et solitude extrême. (Marguerite p.288) :
« Il savait, d’instinct, bien avant
que je ne l’admette, que nous sommes seuls sur cette terre et que nous ne
pouvons rien faire contre cela. Seuls face à nous-mêmes. Seuls au milieu des
autres. Quoi que nous fassions pour donner le change. Et c’est la beauté de
cette solitude profonde qu’il est arrivé à peindre ». Cette Valse des
arbres et du ciel, c’est la danse de deux êtres. L’un, libre, seul et habité
tout entier par la peinture. L’autre, qui ne veut vivre que pour le premier.
Mais est-ce ainsi qu’on aime ? Une valse bancale, déséquilibrée, qui n’en
est que plus touchante. Jean-Michel Guenassia nous offre aussi au détour d’une
page, sans doute l’une des plus délicates déclarations d’amour (p.192-193) « Regardez-moi, Vincent, dites-moi que
je ne compte pas pour vous, que vous ne m’aimez pas, que vous ne voulez pas de
moi. Dites-le moi dans les yeux et je partirai, et je ne vous embêterai plus
jamais.
La nuit est tombée, Marguerite, je t’aperçois à peine ».
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