couverture : LAPI / Roger Viollet |
J'ai une tendresse particulière pour Alexandre Jardin, l'éternel amoureux, l'éternel enthousiaste... Parfois un peu agaçant dans sa joie de vivre perpétuelle. Peut-être parce qu'elle nous renvoie parfois à notre propre désillusion. J'aurais bien du me douter que cela cachait quelque chose... Alexandre Jardin lève le voile sur ce "quelque chose" dans Des Gens Très Bien. Ici, pas de zèbre, pas de fantaisiste, pas de clown excentrique, plutôt des personnages gris, ombrageux, détestables.... Alexandre Jardin ne rompt pas seulement avec ses thèmes favoris ou son style dans ce livre. Il rompt avec une part de lui-même et dévoile le passé lugubre de sa famille pendant la Seconde Guerre Mondiale. Son grand-père paternel était le bras droit de Pierre Laval, en juillet 1942. Au moment donc de la rafle du Vel d'Hiv (pour rappel : 13.152 personnes arrêtées, dont 4.115 enfants. Moins de cent personnes survivront. Aucun enfant.). Alexandre Jardin a mené une enquête minutieuse sur son ascendant. Et il arrive à la conclusion que Jean Jardin ne pouvait pas ignorer ce qu'il se passait. Il dénonce aussi le silence coupable du reste de la famille. Ses oncles. Son père, pourtant adoré et parti trop tôt. Son père avait tenté un aveu dans le Nain Jaune mais trop discret pour être entendu. Où Alexandre Jardin a-t-il trouvé le courage de dire, de casser ce silence ? Question de survie sans doute. A la lecture de ce livre, une question m'a taraudée : aurais-je eu le même courage ? aurais-je parlé ? Un grand-père, c'est une part d'enfance. Un jardin, des jeux, ses blagues sur grand-mère pour nous faire rire, le chien qu'il nourrissait sous la table... comment trahir cette part d'enfance ? En lisant Alexandre Jardin, on comprend son besoin vital de rétablir la vérité pour alléger ce poids bien trop lourd à porter. On peut déplorer une écriture moins fluide dans ce livre, mais on ressent à chaque phrase la douleur du petit-fils qui doit se séparer de son grand-père. Une véritable leçon d'honnêteté et de courage. Et pourtant... Nous ne sommes pas responsables des actes de ceux qui nous ont précédés.
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